Le blog de Malizor

Malizor, AKA Nicolas Delvaux

25 juillet 2020

Cet article a également été publié en tant que journal sur LinuxFr.

Le commencement

En février 2018, j’ai reçu un appel d’une entreprise de crédit m’annonçant que le prélèvement de ma première mensualité avait échoué, et qu’il fallait donc que je fasse quelque chose au plus vite.

J’ai nié avoir ouvert un quelconque crédit et dit qu’ils devaient se tromper de personne.
Mon interlocuteur me raccroche alors au nez en me disant sèchement « très bien, vous aller donc être interdit bancaire et vous vous débrouillerez avec les huissiers ».

Assez sonné par ce que je venais d’entendre, je rappel l’entreprise en question. J’ai la chance de tomber sur quelqu’un de plus aimable. Évidemment, on me demande des numéros de dossiers que je n’ai pas, mais ils finissent par retrouver un contrat à mon nom, portant sur sur un crédit à la consommation d’environ 2000€.

On me dit que si je ne suis pas à l’origine de ce contrat, il faut que j’aille porter plainte pour usurpation d’identité, muni du numéro de contrat qu’on me communique ainsi que de certains détails comme les adresses mail et postale qui ont été utilisées pour ouvrir le contrat (et qui ne sont effectivement pas les miennes). Et qu’il faut que je le fasse au plus vite car, en attendant, la procédure de recouvrement continue.

Dont acte. Je me rend, fleur au fusil, auprès du commissariat de police de ma ville.

De l’inutilité de la police

Je passe sur les heures d’attente (le tout à proximité d’un bureau où les agents en présence se racontent LONGUEMENT leur week-end, alors qu’il n’y a qu’un pauvre type qui s’occupe de prendre les plaintes).

Quand c’est enfin mon tour, on me dit qu’on ne peut pas prendre ma plainte car je n’ai pas la copie du contrat que je n’aurais sois disant pas signé.
J’ai essayé de parlementer, en expliquant que je leur fournissait tous les détails nécessaires (incluant même le contact de la responsable du service fraude de l’entreprise de crédit), mais en vain. Apparemment, une enquête est insoluble si elle nécessite de passer un coup de téléphone.

Je repars malgré tout avec une main courante, que j’envoie à l’entreprise de crédit.

Le lendemain, on me rappel pour me dire qu’un vrai dépôt de plainte est absolument nécessaire et que la procédure de recouvrement continue. J’explique la situation et demande une copie du contrat, sans quoi ma plainte sera encore refusée. On me dit que c’est impossible et que la police ne peut pas refuser de plainte (la théorie et la pratique…). À défaut, je demande au moins un courrier, un document concret, indiquant noir sur blanc que ce contrat existe, ainsi que toutes les références qui me sont communicables.

Je reçois ce courrier quelques jours plus tard (entre temps l’entreprise a continué de me harceler tous les jours pour savoir où j’en étais). Je retourne donc au commissariat. Même résultat : longue attente, refus de plainte et énorme frustration.

La police ne veut pas de plainte tant que je n’ai pas le contrat. Et l’entreprise refuse de me communiquer le contrat (elle serait par contre ravie de le communiquer à la police).

À ce stade, je ne sais plus quoi faire.

« À titre exceptionnel, on accepte de vous aider »

Après des heures au téléphone, je fini par réaliser que le crédit dont il est question a été souscrit suite à un achat en ligne. L’usurpateur a acheté quelque chose et a sélectionné une offre du type « payez en plusieurs fois, première mensualité dans X mois ». Le créancier avec qui je parle depuis le début est en fait l’organisme de financement rattaché à la boutique en ligne sur laquelle l’achat a été fait.

Je décide donc de contacter le service réclamation du site en question. J’ai la chance de tomber sur quelqu’un de compréhensif, qui confirme l’absurdité de ma situation. En effet, légalement, ils n’ont pas le droit de me fournir une copie d’une facture d’un achat que je n’ai pas effectué. Sinon je pourrais être n’importe qui et demander la facture de n’importe quoi, en prétextant être la victime d’une usurpation. C’est bien pour ça que seule la police, dans le cadre d’un enquête, pourrait légitimement y accéder.

Cette personne accepte malgré tout, à titre exceptionnel, de m’envoyer une copie de la facture. L’usurpateur a acheté une TV en ligne et est allé la retirer en magasin, en présentant certainement une fausse carte d’identité.

En tout cas, je peux enfin aller porter plainte ! Ma satisfaction d’en finir avec cette galère ne sera même pas entamée par la mauvaise volonté évidente et l’absence complète d’empathie de l’agent de police que j’ai eu en face ce jour là.

Ce n’est pas fini…

Six mois plus tard, alors que j’avais joyeusement repris le cours de mon existence, je suis convoqué par mon employeur. Celui-ci a en effet reçu un courrier d’un huissier, lui demandant si je travaillais toujours chez lui et, le cas échéant, de me demander de le rappeler au plus vite.

C’est fou comme ce genre de chose met tout de suite une bonne ambiance au bureau !

Bref, j’appelle et on m’explique que je suis un mauvais payeur car j’ai cette fois souscrit à un crédit renouvelable pour plus de 6000€, sans jamais le rembourser.

L’avantage, c’est que je sais maintenant à quoi m’attendre : j’insiste tout de suite pour obtenir le contrat en question avant d’essayer d’aller porter plainte. Et comme j’ai affaire avec un huissier qui en a apparemment déjà vu d’autres, les choses se passent plus sereinement. Je réussi à porter plainte quelque jours plus tard.

L’explication

Après encore 6 mois de trêve, je reçois une lettre d’un nouvel agent de recouvrement, concernant un crédit de 7000€. Je suis habitué maintenant, donc la procédure se passe relativement simplement.

La nouveauté ici, c’est qu’au lieu d’une simple copie du contrat, on me transmet tout un dossier, incluant tous les justificatifs fournis par l’usurpateur.

Dans le lot, je trouve une copie de ma véritable carte d’identité ainsi qu’une fiche de paie contrefaite, mais néanmoins basée sur une vraie (si la date a été changée et les montants recalculés en fonction, tout le reste colle).

Jusqu’à présent je ne savais pas d’où venait l’usurpation : j’envisageais par exemple quelqu’un qui m’en voulait personnellement, un voisin ou quelqu’un qui aurait fouillé mes poubelles.
Mais s’il a pu m’arriver de présenter ma carte d’identité a de multiples reprises (elle aurait donc pu être scannée sans que je le sache), je ne laisse pas traîner mes fiches de paie n’importe où.

La fuite ne peut donc venir que de fin 2017, lorsque je cherchais un logement. C’est la seule occasion où j’ai pu fournir tous ces documents, via des dossiers de locations. Malheureusement, ayant déposé plusieurs dossiers pour plusieurs appartements, je ne peux pas remonter la piste plus loin par moi même. De plus, l’usurpateur n’est pas forcément un des bailleurs à qui j’ai eu à faire : l’un d’eux a pu mal se débarrasser des documents, qui ont donc pu être récupérés par un tiers.

J’ai bien entendu transmis toutes ces informations à la police.

Où je décide de prendre le problème à bras-le-corps

À ce moment de l’histoire, je réalise qu’il n’y a pas de raison que les demandes de recouvrement cessent d’elles même, et qu’il faut donc que je prenne les devants. Je fais des recherches, et je tombe sur le site de la Banque de France, qui me conseil de prendre rendez-vous pour voir si je ne suis pas fiché chez eux.

En faisant cela, je constate alors que je suis fiché pour des incidents de paiement concernant 6 crédits différents ! Parmi ceux là je retrouve les trois dossiers précédents, qui n’ont pas été annotés avec la mention « identité usurpée », alors que j’avais pourtant bien fait toutes les démarches.

On me conseil également d’envoyer un courrier à la CNIL pour demander un accès au Fichier des COmptes BAncaires (FICOBA), pour voir si des comptes ont également été ouverts à mon insu. L’idée était judicieuse, car je découvre ainsi deux comptes courants usurpés auprès de deux grandes banques.

Je signale évidemment tout ceci à la police.

Pour en finir, j’envoie enfin tout un dossier à la Banque de France afin que l’usurpation de mon identité soit reconnue pour l’ensemble des incidents de paiement qui me sont rattachés. La procédure se terminera avec succès quelques semaines plus tard.

Si c’était à refaire ? (TL;DR)

Me concernant, le problème principal est que j’ai mis du temps avant de comprendre de quoi j’étais vraiment victime.
J’ai perdu un an à traiter les créanciers au fil de l’eau, alors que j’aurais pu réaliser les démarches auprès de la Banque de France et de la CNIL dès le premier incident.

De ce point de vu, j’en veux réellement aux policiers du commissariat de ma ville.
L’aide aux victimes est absolument lamentable, avec des agents qui font le maximum pour refuser les plaintes et qui, lorsqu’ils sont obligés de les prendre, font le strict minimum.
J’avais une véritable appréhension à chaque fois que j’ai dû me rendre à nouveau au commissariat pour réaliser une démarche. C’est clairement ce qui m’a poussé à vouloir passer à autre chose au plus vite après les premières affaires, sans chercher à creuser plus pour trouver la source de l’usurpation dont j’étais victime.

Conseils aux victimes

Si vous êtes contacté par un créancier comme je l’ai été, gardez votre calme et exigez qu’on vous envoie une copie du contrat que vous avez supposément signé. Et gardez bien en tête que la personne qui vous contact peut-être un sous traitant : il vous faudra alors remonter la chaîne jusqu’au véritable organisme auprès duquel le contrat a été signé.
N’attendez cependant surtout pas une réponse avant de continuer à agir et d’essayer de porter plainte : j’ai eu d’autres témoignages où l’affaire est allé jusqu’à la convocation au tribunal avant que le contrat ne soit fourni.

Évidemment, vérifiez que vous ne voyez pas de mouvement suspect sur votre compte, et faites opposition si c’est le cas (ou faites le tout de même, par précaution).

L’autre chose primordiale à faire est d’aller voir si vous êtes fiché à la Banque de France (fichier FICP, pour Fichier des Incidents de Crédits aux Particuliers). Vous pouvez faire une demande en ligne ou également prendre rendez-vous dans l’antenne locale la plus proche de chez vous. Je vous recommande de vous déplacer au moins la première fois car, en plus d’une réponse immédiate, le fait d’échanger de vive voix avec quelqu’un qui connaît ces problématiques est vraiment appréciable.

Si des incidents de paiements sont enregistrés vous concernant et donc que vous êtes bien fichés, vous serez en mesure d’aller porter plainte immédiatement avec le document qui vous sera remis, même si vous n’avez pas de copie du ou des contrats associés. Faites bien en sorte que la plainte liste explicitement tous les incidents et tous les numéros de contrats associés. En effet, pour mettre un terme aux litiges, les créanciers ont besoin que la plainte cite précisément le dossier qui les intéresse (si la plainte dit "je joins le relevé des incidents", ça ne suffira pas. Même si c’est plus simple pour l’agent de police…).

Envoyez également un courrier à la CNIL pour savoir si des comptes ont été ouvert à votre nom sans que vous le sachiez. Vous n’aurez pas de réponse avant plusieurs semaines, donc si la pêche est bonne vous pourrez aller faire un complément de plainte pour joindre le document que vous obtiendrez au dossier.

Tout ceci fait, vous pourrez ensuite envoyer à la Banque de France une copie de votre/vos plainte.s dans un dossier expliquant vos démarches. La Banque de France se chargera alors pour vous de contacter les différents créanciers pour faire reconnaître votre usurpation d’identité et donc lever votre fichage.

La subtilité de ce qui précède est que si vous faites ces démarches assez tôt, il est possible que d’autres créanciers ne vous ai pas encore fiché (voir que vous ne soyez pas fiché du tout). Me concernant, les fichages ont été enregistrés entre 3 et 10 mois APRÈS que le premier créancier m’ai contacté. Il faut donc consulter régulièrement le fichier de la Banque de France (via des demandes en ligne), pour s’assurer que de nouveaux incidents n’y apparaissent pas.

Conseils pour tout le monde

Voici quelques règles « d’hygiène » pour diminuer les risques d’usurpation :

Premièrement, même si ça n’aurait pas aidé dans mon cas précis, achetez un broyeur de documents.
Pas besoin de dépenser beaucoup : un broyeur manuel fera largement l’affaire. Mais appliquez cette règle simple : aucun document mentionnant votre nom, adresse ou toute autre information personnelle ne doit se retrouver dans une poubelle. C’est valable pour les prospectus nominatifs mais aussi les emballages de colis (arrachez les étiquettes).

Si vous avez déménagé, profitez-en pour rapidement renouveler vos papiers d’identité. En effet, dans le cadre de votre recherche de logement vous avez pu fournir ces papiers à plusieurs personnes, pas forcément dignes de confiance. Le renouvellement pour changement d’adresse est gratuit et permet d’invalider les papiers précédents. Il serait bête de s’en priver.

Si vous cherchez un logement et devez déposer des dossiers contenant vos fiches de paie ou autres documents sensibles, dans la mesure du possible essayez de marquer les documents.
L’idée est que si un dossier est utilisé pour usurper votre identité, vous puissiez identifier exactement d’où provient la fuite (si vous réussissez à mettre la main sur les justificatifs que l’usurpateur à utilisé).
Il faut donc que chaque dossier soit rendu unique, d’une manière que vous seul reconnaîtrez. Vous pouvez par exemple rajouter de faux artefacts de photocopie, ou autres petits détails que l’usurpateur ne prendra pas la peine de modifier mais que vous pourrez repérer.

Enfin, si vous en avez les moyens, réfléchissez à souscrire à une assistance/assurance juridique. Je n’en avait pas personnellement, mais quand on a à faire avec des huissiers et une police récalcitrante, j’aurais bien aimé pouvoir me reposer sur l’aide de professionnels. Sans assurance, je n’ai pas pu me résoudre à dépenser des centaines d’euros pour consulter un avocat.
Je m’en suis finalement sorti, mais disons qu’une protection juridique m’aurait permis de garder l’esprit plus tranquille.

Dans un monde idéal

Que pourrait-on changer plus globalement, pour diminuer les risques et l’impact des usurpations d’identité ?

Premièrement, comme j’ai essayé de le faire modestement ici, informer.
Pas seulement les particuliers, mais aussi les forces de l’ordre, qui devraient savoir mieux gérer ces cas et donc mieux conseiller les victimes.

Enfin, pour parler de ce qu’il faudrait changer dans la loi, je suggère un système de fichage volontaire auprès de la Banque de France.
En effet, si le fichage empêche de souscrire à de nouveaux prêts, il a pour avantage de bloquer également tous les usurpateurs. Ce qui fait que, en faisant reconnaître son usurpation, la victime rouvre potentiellement la voie pour que les usurpations reprennent de plus belle !

Une solution radicale pour les personnes comme moi qui ne souscrivent à des crédits que très rarement, serait de pouvoir autoriser ou non l’ouverture de prêts à son nom depuis un compte en ligne sur le site de la Banque de France.
Si j’avais cet outil à disposition, je l’activerais immédiatement pour ne le lever que ponctuellement, lorsque j’aurais vraiment besoin de faire un crédit.

8 décembre 2012

En ce moment la mode est à la prolifération d’articles anti-ubuntu. En effet, cette distribution deviendrait « commerciale », « propriétaire » et plein d’autres adjectifs désagréables.
En résumé : tout libriste digne de ce nom devrait fuir Ubuntu comme la peste.

Seulement voilà : ce n’est pas mon cas. Pourquoi ? C’est ce que je vais essayer d’expliquer dans cet article.

Les développeurs d’Ubuntu sont-ils vraiment méchants ?

Ubuntu n’est pas irréprochable et il est sûr que certaines critiques sont légitimes.
En revanche, beaucoup d’autres ne sont pas fondées ou déchaînent les passions pour peu de choses. Commençons donc par essayer de démêler le vrai du faux (sans ordre particulier)1.

Ubuntu devient propriétaire !

La politique d’Ubuntu est et a toujours été de ne fournir par défaut que des logiciels libres, à l’exception (dans la mesure de ce qui est légalement possible) des pilotes nécessaires à un bon support du matériel. Cette politique n’a pas changé. Il n’y a pas plus de logiciels non libres dans la dernière version d’Ubuntu que dans la précédente.

Mais il y a des logiciels propriétaires dans la logithèque !

Depuis plusieurs versions, ceux qui le souhaitent peuvent en effet installer facilement des logiciels propriétaires via la logithèque Ubuntu.
J’avoue avoir du mal à comprendre ceux qui utilisent cet argument. Il leur suffit de ne pas installer les logiciels en question...

Les nouvelles fonctionnalités seront maintenant développées en secret !

La plupart des développeurs (de logiciels libres ou non) travaillent de cette façon.
Linus Torvald a développé Linux dans son coin et ne l’a rendu public que lorsque le projet était suffisamment avancé à son goût.
Il en a été de même avec Systemd, Wayland et même les projets GNU.

Un développeur lambda, qu’il travaille sur un nouveau projet ou sur l’amélioration d’un programme existant, codera d’abord dans son coin. Il ne dévoilera pas son travail avant de se sentir prêt.

Du thème jusqu’à Unity en passant par Launchpad, Canonical a toujours travaillé comme cela. Ce n’est donc absolument pas une nouveauté et il est un peu ridicule de crier à la fermeture d’Ubuntu.

Ce que Mark a annoncé, c’est que les membres de la communauté qui le souhaitent pourront dorénavant participer aux projets développés en interne chez Canonical, sachant que ses projets seront au final tous publiés sous une licence libre (au moins GPLv3).

Du point de vue de la communauté, il s’agit donc indéniablement d’un progrès.

Canonical est basée (fiscalement) sur l’île de Man !

C’est vrai.
Pour ceux qui ne le savent pas, l’île de Man est un paradis fiscal.

À titre personnel, étant donné que cet argent est investi dans le développement de logiciels libres (qui sont des biens communs) et que, aux dernières nouvelles, Canonical ne dégageait toujours pas de bénéfices, cela ne me pose pas de problème.

Je peux tout de même comprendre que cela puisse déranger certaines personnes.

Ubuntu inclut maintenant de la publicité !

(on parle ici des résultats Amazon qui apparaissent par défaut lors des recherches dans Unity sur Ubuntu 12.10)

Il y a ici deux choses à distinguer. Le concept et son implémentation.
Le principe de pouvoir rechercher et comparer des produits directement depuis le tableau de bord est, selon moi, une excellente idée car c’est tout simplement pratique.

J’ajoute qu’il ne s’agit techniquement pas de publicités, car ce ne sont que des résultats de recherche qui s’affichent (personne ne paye pour apparaître lorsque l’utilisateur tape un certain mot).
On sait également que d’autres fournisseurs qu’Amazon seront intégrés dans les prochaines versions et que ces nouveaux services seront choisis en fonction de leur utilité (il n’est pas obligatoire que, comme avec Amazon, Canonical reçoive une petite somme sur chaque achat réalisé via le tableau de bord).

Concernant l’implémentation telle qu’elle est disponible dans Ubuntu 12.10, j’admets que cela puisse se discuter davantage.
Sachez tout de même que, suite aux retours de la communauté, les choses ont été améliorées. Les communications avec le serveur « anonymisateur » chez Canonical sont maintenant chiffrées et cette fonctionnalité peut-être désactivée en un clic dans le panneau « Vie privée » des paramètres.

Certaines personnes (dont Richard Stallman lui-même) trouvent cela insuffisant, et je les comprends.
J’admets qu’à titre personnel, je préférerais également que les recherches sur Internet ne soient pas faites par défaut dans le tableau de bord, mais plutôt dans une lentille séparée.

Mais je comprends également les arguments de Canonical.
Comme l’a expliqué Jono Bacon sur son blog, la problématique de la vie privée est très relative quand des millions de personnes ne voient absolument aucun problème à diffuser leurs vies sur Facebook et autres réseaux.
L’objectif d’Ubuntu étant de convenir au plus grand nombre, je peux concevoir que cette fonctionnalité soit pertinente (tout en sachant que son « potentiel de nuisance »2 reste bien inférieur à, par exemple, Google).

Au-delà de ça, Mark Shuttleworth a été très clair lors de l’annonce de cette nouveauté :

What we have in 12.10 isn’t the full experience[…]. If the first cut doesn’t work for you, remove it, or just search the specific scope you want[…].

(Ce qui est disponible dans Ubuntu 12.10 n’est pas l’expérience complète. Si cette première version ne vous convient pas, supprimez là ou faites vos recherches en utilisant les filtres disponibles)

Bref, même les concepteurs de cette fonctionnalité disent qu’elle est imparfaite et qu’elle s’améliorera grandement dans les prochaines versions.
Pour moi il est donc urgent d’attendre avant de condamner Ubuntu sur la simple base de ce qui n’est, finalement, qu’un premier jet.

Ubuntu a renié ses racines !

Rappelez vous du bug numéro 1 sur Launchpad, rapporté par Mark Shuttleworth lui-même :

Proprietary operating systems have a majority market share

(Les systèmes d’exploitation propriétaires sont majoritaires sur le marché)

Les dernières évolutions d’Ubuntu poursuivent toujours cet objectif. La clé de voûte du projet Ubuntu est donc toujours bien là.

Canonical et la communauté s’éloignent de plus en plus !

Je tournerai la chose autrement.
Canonical a beaucoup grossi ces dernières années et a multiplié les initiatives, ce qui (vu l’ampleur de la tâche) était nécessaire.
En revanche, j’ai l’impression que la communauté n’a malheureusement pas grandie dans les mêmes proportions.

J’ai plusieurs hypothèses pour expliquer l’apparent retard de la communauté.
Par exemple, il est indéniable que plusieurs contributeurs ont quitté le navire suites aux décisions qui ont été prises dans les dernières versions d’Ubuntu.
C’est dommage, mais ce genre de choses est malheureusement inévitable lorsque l’on souhaite franchir le chasme.

J’ai aussi l’impression qu’il y a une certaine « mode » qui consiste à rabaisser Ubuntu sans s’embarrasser d’arguments valables ni de logique.
Pour ne donner qu’un exemple, dans la blogosphère comme dans mon entourage, il n’est pas rare que des personnes se disent fier de boycotter Ubuntu en utilisant des distributions comme Xubuntu ou Linux Mint. Et je ne parle pas des personnes qui quittent Ubuntu car « ce n’est plus libre » et qui, pourtant, installent des pilotes propriétaires sur leurs distributions.

Au-delà de ça, je tiens à rappeler qu’Ubuntu a toujours eu une gouvernance ouverte. L’organisation du projet est transparente.
Après avoir fait ses preuves, n’importe quel contributeur peut obtenir les droits de commit et d’upload dans les dépôts. De plus, Canonical emploie pas moins de 6 personnes dans sa « Community Team » dans le but exclusif de faciliter la vie des contributeurs (écriture de documentations, mise en place de process…).

Si vous pensez que la communauté ne pèse pas assez sur les décisions qui sont prises, plutôt que de vous en plaindre, vous devriez essayer de la renforcer en y contribuant (c’est ça la « méritocratie » ou encore la « doocratie »).

Pourquoi j’utilise Ubuntu

Si j’utilise Ubuntu, c’est pour mieux y contribuer. Si je veux y contribuer, c’est parce que je crois que c’est l’endroit où je peux être le plus utile.
Au travers du succès d’Ubuntu, ce que je souhaite c’est avant tout la démocratisation du logiciel libre et de la culture qui va avec.

On va me dire que cela ne changera pas grand-chose si M. Michu se met à utiliser du logiciel libre « parce que c’est gratuit » ou « parce que c’est à la mode ».
C’est seulement vrai à court et moyen terme.
Pensez aux enfants de M. Michu qui, eux, auront peut-être entendu parlé de « code source » à l’école.
Ils seront d’autant plus facile à sensibiliser aux idéaux libristes qu’ils utiliseront déjà un environnement informatique majoritairement libre.

Bien sûr il existe d’autres arguments plus « pragmatiques », qui devraient au moins inciter ceux à qui Ubuntu ne convient pas à rester mesurés et constructifs dans leurs critiques.
Par exemple, plus Ubuntu gagnera de parts de marché, plus les constructeurs feront attention à ce que leurs produits soient compatibles avec Linux.

Ubuntu est sur la voie du succès

À ma connaissance, Ubuntu est la seule distribution GNU/Linux qui a pour objectif de s’imposer auprès du grand public et qui se donne les moyens de ses ambitions.

Lors du dernier rassemblement des développeurs Ubuntu, Chris Kenyon (vice-président responsable des ventes chez Canonical) a fait une présentation très intéressante.
On y a appris, entre autre, qu’en 2011 il y a eu plus d’ordinateurs vendus sous Ubuntu que de Mac (portables et fixes) vendus en 2007 (soit environ 7 millions d’unités).
Il a également annoncé que, d’ici 2014, Ubuntu sera pré-installé sur 9% des ordinateurs vendus3.

Comme quoi, les gens de Canonical doivent à peu près savoir ce qu’ils font.


  1. Si j’ai oublié des points qui vous paraissent importants, n’hésitez pas à me les signaler dans les commentaires ! ↩

  2. Cette fonctionnalité ne peut être nuisible que si Canonical ne tient pas sa promesse d’anonymiser tous les logs.
    Sachant qu’on leur fait déjà de facto confiance pour ne pas casser notre système à chaque mise à jour… ↩

  3. Actuellement, la plupart des ventes sont réalisées en Asie. ↩

10 juin 2012

À l’occasion de la confirmation de la sortie « prochaine » d’une version GNU/Linux de la célèbre plateforme de distribution de jeux vidéo Steam, je me suis retrouvé face à une de mes contradictions.
En tant que libriste, comment puis-je me réjouir de l’arrivée de programmes privateurs sur nos distributions préférées ?

Après réflexion, je me suis rendu compte que le problème était plus compliqué qu’il n’y parait.

À la frontière du logiciel et de l’œuvre d’art

Certains lecteurs trouveront peut-être ce titre exagéré. Et pourtant…
Les jeux vidéo ne sont définitivement pas des programmes informatiques comme les autres.

Plutôt que d’essayer d’écrire un énorme pavé pour convaincre les indécis, je préfère vous renvoyer sur cet article sur le blog de Laurent Checola et, plus particulièrement, sur le débat très intéressant dans les commentaires.

Il en ressort grosso-modo ceci :
Si on considère que « certains films », « certains livres » ou « certaines musiques » sont des œuvres d’art, alors il en est logiquement de même pour « certains jeux vidéo ».
Or, comme l’appréciation d’une œuvre est toujours subjective, on peut considérer que le Jeu-vidéo, dans son ensemble, est un art. Au même titre que le Cinéma, la Musique, l’Architecture et autres.

Ce fait étant établi, on en arrive à un point intéressant.
Car si on peut raisonnablement exiger que tous les logiciels soient libres, il n’en est pas de même pour les œuvres d’art.

Richard Stallman lui-même fait cette distinction entre les « œuvres pratiques » (incluant donc les logiciels) et les « œuvre artistiques et de divertissement » (ce qui inclue également les jeux vidéos).
Toujours d’après Richard Stallman, il serait acceptable de ne permettre que la redistribution non commerciale de copies non modifiées de telles œuvres, au moins pendant un certain temps (il propose une durée de 10 ans avant le passage dans le domaine public).
Source (en anglais)

Comme vous le voyez, dans ce système, la classification des jeux vidéo est assez floue.

Mais ne suffirait-il pas de séparer la partie « logicielle » du jeu ?

En effet, pourquoi ne pas publier les briques logicielles (moteurs graphique/physique…) sous une licence libre et le reste (scénario, textures, musiques…) sous une licence plus restrictive ? C’est, par exemple, la politique de projets comme 0ad ou Lugaru.

À titre personnel, je trouve cette façon de faire intéressante et profitable, mais je ne pense pas qu’elle soit exigible pour autant.

En tant qu’œuvre, un jeu-vidéo a une intégrité propre. Modifier le comportement d’un de ses composants logiciels peut avoir des conséquences sur les émotions que ressentent les joueurs à l’arrivée. De par ce fait, il me parait légitime que les réalisateurs d’un jeu puissent vouloir garder la main sur ce processus, au moins pendant un certain temps.

Quelles concessions peut-on accepter de faire ?

À mon sens, la principale incompatibilité entre le « monde du libre » et l’industrie actuelle du jeu-vidéo est la politique concernant les DRM.

Ces « menottes numériques », en plus d’être inefficaces, sont parfois scandaleusement contraignantes pour le joueur. Il n’est malheureusement pas rare de voir des jeux qui exigent une connexion permanente à Internet, même pour jouer en solo1. Pire encore, certains jeux peuvent même devenir inutilisables après avoir changé un composant matériel de l’ordinateur.

Mais si l’industrie actuelle du jeu-vidéo est très loin d’être parfaite, il n’est pas non plus question de la condamner dans son ensemble.
Certains développeurs, dont la plupart des indépendants, ont renoncé aux DRM. C’est également le cas de certains « gros » studios comme CD-Projekt (studio derrière des jeux fameux comme The Witcher).

Alors, il suffit qu’un jeu n’ait pas de DRM pour qu’il soit éthiquement acceptable ?

Bien sûr, l’absence de DRM ne veut pas dire pour autant que la redistribution de copies (même dans un cadre non commercial) est autorisée. Et encore moins que le jeu sera libéré, même à long terme.

Néanmoins, si on ne souhaite pas se priver de certains types jeux non représentés parmi les jeux libres2, il est nécessaire de faire des compromis. Car, à moins d’une refonte drastique des modes de financement, il est très peu probable qu’un éditeur permette la libre distribution de ses jeux avant longtemps.

L’absence de DRM étant une chose à encourager, je pense que l’on peut la considérer comme étant une condition suffisante, du moins pour le moment.

Au-delà de ça, je conseillerai de faire du cas par cas.
Par exemple, Portal 2 impose l’utilisation de Steam, ce qui s’apparente plus ou moins à un DRM3. Mais, à côté de ça, Valve fourni un éditeur de niveau très poussé tout en proposant un service simple (et sans escroquerie) de publication des créations de la communauté. Ce qui peut donc s’apparenter au retour de la liberté de modification. À mon sens, un jeu comme Portal 2 peut donc également faire partie de la liste des jeux « éthiquement acceptables ».

Pour résumer :

De part leurs statuts d’œuvres, il n’est pas nécessaire d’exiger que tous les jeux soient libres dans le sens « logiciel libre » du terme.

Au jour d’aujourd’hui, je pense qu’il est raisonnable, même pour un libriste, de jouer à certains jeux « privateurs », sous réserve que ceux-ci n’abusent pas, entre autre, des DRM.
À plus long terme, il serait souhaitable de revoir les modes de financement et de développement afin de pouvoir, au moins, autoriser la redistribution non commerciale de copies identiques d’un jeu.

En bref, j’attends avec impatience l’arrivée de Steam sur GNU/Linux.


  1. À ma connaissance, l’exemple le plus récent est Diablo III. ↩

  2. Le fait est que l’écrasante majorité des jeux libres sont « orientés arcade ». Il semble en effet qu’il soit beaucoup plus difficile de réunir une communauté de bénévoles autour d’un jeu « scénarisé ». Si vous voulez, on peut parler du pourquoi du comment dans les commentaires. ;-) ↩

  3. Contrairement aux DRM habituels, Steam offre quelques contreparties aux joueurs. Que ce soit au niveau des fonctionnalités intégrées à la plateforme qu’au niveau des prix, souvent très bon marché par rapport à ce que l’on trouve en boutique. Libre à chacun de juger si les avantages surpassent les inconvéniants… ↩

16 janvier 2012

C’est au début des vacances de noël que le Microsoft© Windows© Vista© de l’ordinateur de mes parents a décidé de rendre l’âme. Freeze quelques minutes après le démarrage, mode sans échec qui échoue et même un BSOD aléatoire. La bête était à l’agonie et Internet était formel : il fallait réinstaller.

Seulement voila : réinstaller Windows ce n’est pas vraiment ma tasse de thé.
Et puis pour quelle raison est-ce que je devrais travailler bénévolement pour le compte de Microsoft ? Ce n’est pas comme si mes parents n’avaient pas payé la taxe Windows en achetant cet ordinateur...

Bref, je ne voulais pas leur réinstaller de Windows. Mais qu’installer alors ? C’est là que les choses commencent à devenir amusantes.

Vu que je connais assez bien mes parents, je connais plutôt bien leurs usages :

  • 80% de Web
  • 10% de traitement de texte et de tableur
  • 9% de tchat vidéo avec la famille
  • 1% de maintenance/mise à jour de divers appareils (GPS...)

En voyant ce découpage, vous pensez peut-être qu’au moins 90% de leurs besoins sont couverts par GNU/Linux et qu’il n’y a donc même pas à réfléchir. Oui mais voila, contrairement à ce que semblent penser certaines personnes1, ce n’est pas parce qu’un usage est rare qu’il est forcément facultatif.

J’expliquerais par la suite ce que j’ai fait concernant ces fameux 10%, mais commençons d’abord par le choix du système d’exploitation en lui même et la façon dont il a été reçu.

LTS or not LTS ? That is the question !

Installer une distribution GNU/Linux sur l’ordinateur de mes parents n’est pas une chose anodine : tacitement, cela veut dire que je prends la responsabilité d’en assurer le « service après vente » en cas de problème. Ce n’est plus comme avant où, dans la plupart des cas, je me contentais de dire « C’est Windows, c’est normal si ça plante. ».

Utilisant Ubuntu au quotidien, c’est naturellement vers cette distribution que je me suis tourné.

La recherche de stabilité aurait logiquement voulu que j’opte pour Ubuntu version 10.04 LTS. Seulement voilà, ce n’est pas si simple.

La prochaine LTS arrive dans peu de temps avec un changement de taille : l’interface Unity. Je n’ai personnellement rien contre cette interface (je l’utilise d’ailleurs au quotidien), mais je redoutais la réaction de mes parents. En fait, c’est surtout la perspective de devoir leur imposer2 ce nouveau changement lors de la migration vers cette nouvelle LTS qui m’a fait réfléchir.

Au final, j’ai opté pour une installation de Ubuntu 11.10 (version 64 bits).
Les avantages de ce choix sont :

  • Unity est déjà le bureau par défaut, il n’y aura donc pas de « choc » lors de la migration vers Ubuntu 12.04 (sur laquelle ils resteront par la suite). Tous les gros changements ont donc lieu en même temps.
  • Pas mal de mises à jour sont passées depuis octobre. La stabilité de cette version ne vaut certes pas celle d’une 10.04, mais elle me semble tout de même acceptable.

Suite à l’installation, je me suis occupé de la configuration du système (mais sans toucher aux paramètres de l’interface) :

  • Mise à jour
  • Installation des traductions manquantes
  • Installation de Flash
  • Installation du nécessaire à la lecture de CD audio et de DVD vidéo
  • Configuration de l’imprimante et du scanner (Brother DCP 770cw). Ça fonctionne bien, mais j’ai été obligé de passer par la ligne de commande pour corriger l’installation des pilotes (entre autre à cause du 64 bits).
  • Installation d’un serveur SSH (pour pouvoir les dépanner si je ne suis pas à proximité)
  • D’autres détails, plus ou moins anecdotiques.

Le système est maintenant prêt à répondre à au moins 90% des besoins de mes parents.

Voici donc venu le moment du « premier contact ».

Le couple Michu face à Unity

Mes parents font parties de ce groupe important (majoritaire ?) de personnes qui ont « peur » de l’informatique.
La moindre fenêtre sortant de l’ordinaire, le moindre message (même clair et explicatif) les laisse totalement au dépourvu.
Ils ont « peur de faire des conneries ».

J’étais donc assez inquiet en leur présentant Unity, avec les modifications d’habitudes qu’il implique par rapport à Windows.

Et bien, il se trouve que Unity ne les a pas déconcerté. Je dirais même plus, ils ne l’ont presque pas remarqué.

Il y a pourtant des changements bien visibles :

  • Le launcher sur la gauche qui se masque automatiquement et qui remplace la barre de tâche habituelle. ← La plupart du temps ils se contentent de la seule fenêtre maximisée de Firefox. Cela ne les a donc pas vraiment perturbés.
  • Le menu global. ← Ils utilisent les menus vraiment très rarement (je dirais moins d’une fois par jour). Le menu déporté (et même caché par défaut depuis cette version) ne les dérange visiblement pas. Après quelques tâtonnements, ils ont compris que pour faire telle action, il fallait aller chercher en haut de l’écran.

Je leur ai également expliqué le fonctionnement du dash (le moteur de recherche intégré à Unity) et le système des bureaux virtuels, mais ils ne s’en servent à priori pas. Cela viendra peut-être.

À vrai dire, je ne m’attendais pas à ce que la transition se fasse aussi facilement. Une fois les raccourcis les plus utilisés placés dans le launcher, quelques minutes leur ont suffit pour prendre en main l’environnement.

Je pense que le principal avantage de Unity, du moins en ce qui concerne des personnes comme mes parents, est qu’il sait rester discret. Entre autre, il utilise très peu de place à l’écran et n’affiche pas le superflu par défaut. Unity a donc « l’air » plus simple que d’autres interfaces : il inspire ainsi confiance au commun des mortels.

Pour conclure sur cette partie, je dirais que Unity est remonté dans mon estime. Si je considère mon propre cas, il me serait très difficile de rester productif sous Unity sans utiliser constamment les raccourcis claviers. J’avais, inconsciemment, généralisé mes usages à tout le monde, ce qui me rendais naturellement sceptique sur l’ergonomie de Unity pour M. Michu.

Je suis somme toute ravi de m’être trompé.
C’est, à vrai dire, rassurant : Canonical ne paye pas son équipe design ni leurs onéreux tests d’utilisabilité en vain.

Le tchat vidéo, ou le désert du libre

Comme beaucoup de personnes, mes parents aiment bien discuter par webcam interposées avec des proches.
Sous Windows, ils utilisaient Windows Live Messenger (ex MSN).

Seulement voilà, je n’ai trouvé absolument aucun logiciel supportant le tchat vidéo via WLM sous GNU/Linux.
Plus exactement, il semble que ce protocole propriétaire ait changé il y a un certain temps, cassant de fait le support que la communauté avait laborieusement rétroconçut.

Je me suis donc retrouvé dans une situation délicate : il fallait rapidement trouver une alternative qui soit fonctionnelle et qui ne nécessite pas de gros changement chez les interlocuteurs (c’est le principe du réseau, si on change d’un côté, il faut changer de l’autre).

La solution s’est en fait imposée d’elle même : passer à Skype.

J’en entends qui grognent dans le fond.
Ça ne me plaît pas non plus. En plus d’un protocole propriétaire, ils utilisent désormais le logiciel Skype, qui n’est pas libre.

Mais, à vrai dire, c’était de loin la solution la plus simple :

  • La majorité des contacts de mes parents utilisaient déjà Skype
  • Le client Skype pour GNU/Linux fonctionne bien et s’installe en quelques clics
  • Je n’ai pas trouvé d’autre alternative aussi commode

En effet, du côté de SIP il n’existe malheureusement toujours pas de solution toute en une capable de concurrencer la simplicité d’un WLM ou de Skype.
Et je me voyais mal contacter tous les contacts de mes parents pour leur demander d’installer et de configurer un client SIP.

C’est un peu la même problématique avec Jabber (même si de plus en plus de gros acteurs commencent à s’y mettre).

Je considère que c’est une victoire en demi-teinte. Je préfère qu’ils soient sur Skype plutôt qu’ils demandent à retourner sur Windows. Mais, d’un autre côté, je sais qu’il sera maintenant difficile de les faire passer à autre chose.

I am the 1%

Même si, lorsque l’occasion se présente, j’essaye de les orienter vers l’achat de périphériques compatibles GNU/Linux, mes parents possèdent quelques appareils qui ne peuvent se synchroniser pleinement qu’avec Windows (GPS, console de jeu...).

Ces usages sont très rares (au mieux une fois par mois), mais ils sont cependant indispensables.

Je n’ai trouvé qu’une seule solution : la virtualisation.

J’ai ainsi installé un Windows XP3 via l’excellent VirtualBox (en activant le support de l’USB).

Techniquement, ça fonctionne parfaitement.
Cependant, je me suis heurté à un problème d’ordre pédagogique : comment expliquer la virtualisation à des personnes qui ont déjà du mal à comprendre ce qu’est un système d’exploitation ?
Au final, je ne pense pas avoir été très brillant dans mon explication. Mais ils ont apparemment compris à quoi cela servait et qu’il ne fallait l’utiliser que de façon exceptionnelle. Ce qui est, somme toute, le principal.

Conclusion

Hormis quelques petits cafouillages mineurs (« Pourquoi il se passe rien quand je clique sur le .exe que je viens de télécharger ? »), tout c’est bien passé.

Mes parents semblent satisfaits de cette nouvelle installation. Selon eux, « le PC est plus rapide et a l’air de mieux marcher ».

Ubuntu4, pourvu que l’ordinateur soit pré-installé et pré-configuré, est définitivement prêt pour l’usage quotidien de M. Michu.

À titre personnel, j’ai trouvé cette expérience très intéressante.
Cela m’a donné l’occasion d’observer in vivo comment M. Toutlemonde est susceptible d’aborder une interface graphique.
Je retiendrais quelques exemples fameux : tentative de fermeture de Firefox en cliquant sur le « + » (bouton nouvel onglet), passage d’un marque-pages à un autre en fermant puis en ré-ouvrant Firefox...

Si, comme moi, vous vous intéressez aux IHM et à l’ergonomie en général, je vous encourage également à tenter ce genre d’observations. Vous allez être surpris.


  1. Si j’étais un troll, je citerais ici les designers de Gnome 3. Heureusement, je n’en suis pas un. ↩

  2. Je pourrais bien sûr leur installer un des nombreux autres bureaux disponibles dans les dépôts, mais cela ne sera jamais identique à Gnome 2. De plus, pour faciliter la maintenance, je souhaite que la configuration reste la plus « par défaut » possible. ↩

  3. Une version légale qui traînait dans un coin... ↩

  4. Mon expérience ne me permet pour l’instant pas de généraliser à d’autres distributions. ↩

20 novembre 2011

Ce blog étant tout récent, j’en profite pour ressortir quelques petites choses de mes archives.

La vidéo que je vous propose aujourd’hui est celle d’une conférence que j’avais organisée en octobre 2010 à l’EISTI pour le compte de l’association Atilla.

Tangui Morlier (président de l’April) était venu nous parler des logiciels libres (définition, philosophie, économie...).
Nous avons ensuite essayé de le faire craquer en lui posant des questions pendant plus d’une heure, mais il s’est avéré plus fort que nous. :-)

De nombreux sujets ont-été abordés pendant les questions. Je citerais, entre autre :

  • La vente liée
  • Les brevets logiciels
  • Les DRM
  • L’informatique dite « de confiance »
  • Les dangers législatifs (ACTA, HADOPI, LOPPSI...)

Cette vidéo est mise à disposition sous la licence Creative Commons Attribution 3.0 (© Tangui Morlier et EISTI).

Pour des raisons de bande passante, je ne vous propose qu’un lien torrent. Merci de votre compréhension !

> Télécharger le torrent (220 Mio, format Webm) <

Note : La qualité vidéo est assez mauvaise, mais vous pouvez vous contenter du son (sauf peut-être pour voir les transparents au début).

En bonus, voici l’affiche qui avait été réalisée à l’époque :

affiche
Par l’association Graph’EISTI

13 novembre 2011

Vous aimez Ubuntu et les logiciels libres ?
Vous êtes motivé pour contribuer à l’amélioration de cet écosystème ?

Seulement voilà, il y a un hic : vous ne parlez pas un mot d’anglais.

Vous pouvez tout de même contribuer au sein de la communauté francophone (ce qui est une excellente chose), mais vous aimeriez bien pouvoir également aider à améliorer les choses en amont...

Et bien réjouissez vous, car la chose est désormais possible.

Laissez moi vous présenter la « Brigade francophone anti-bogues » :


Logo, par kao_chen

C’est génial ! Mais, heu, comment ça marche ?

C’est très simple.

Il vous suffit de rapporter votre problème en français auprès de la brigade.
Les membres de la brigade travailleront ensuite avec vous afin de pouvoir, in fine, traduire et transmettre votre rapport auprès des développeurs compétents.

Ce service est animé par des bénévoles, avec 2 grands objectifs :

  • Fédérer les contributeurs afin d’améliorer la qualité globale des logiciels libres et d’Ubuntu en particulier ;
  • Former et sensibiliser les utilisateurs à l’art du rapport de bogue et à la contribution en général.

Entendez par là que la brigade n’est pas un bureau des pleurs. Ne venez nous voir qu’avec une véritable envie de contribuer, pas pour râler.

OK. Concrètement, comment je rapporte un bogue ?

La première chose à faire, avant de rapporter quoi que ce soit, est d’essayer de rassembler le plus d’informations possibles.

  • Êtes-vous sûr qu’il s’agit bien d’un bogue, et pas d’une fonctionnalité ? (ça arrive plus souvent qu’on ne le crois...)
  • Quand et comment l’anomalie survient-elle ? Y a-t-il un moyen de la reproduire à tous les coups ?
  • À l’aide de quelques mots clés et de votre moteur de recherche préféré, vérifiez si quelqu’un n’a pas déjà parlé de votre problème (peut-être s’agit-il d’un simple souci de configuration ?)

Ceci fait, nous pouvons passer au rapport de bogue en lui même.
Note : le bogue décrit dans les illustrations suivantes est imaginaire ;-)

  • Commencez par vous rendre sur cette page1

  • Résumez votre problème en quelques mots dans la case « Summary: » puis cliquez sur « Next ».

illustration1

  • Décrivez en détail votre problème dans le champ « Further information: ».

    Il est important que vous expliquiez :

    • Le comportement que vous attendiez
    • Le comportement que vous avez obtenu à la place
    • Comment reproduire le problème (essayez de donner une procédure « pas à pas »).

    Plus généralement, donnez tous les détails qui vous paraissent pertinents.

    Si vous avez quelques notions d’anglais, vous pouvez également proposer une traduction de votre rapport. Les bénévoles vous aideront à la relire et à l’améliorer.

illustration2

  • Si nécessaire, vous pouvez également ajouter une capture d’écran en cliquant sur « Extra options » puis sur « Parcourir » dans le champ « Attachment: »

illustration3

  • Il ne vous reste plus qu’à cliquer sur « Submit Bug Report » !

illustration4

Et maintenant ?

Les bénévoles vont maintenant essayer de reproduire et donc valider votre problème. Il est possible qu’ils vous demandent quelques précisions supplémentaires.

Ils vérifieront ensuite si ce bogue n’a pas déjà été rapporté en anglais et, si la voie est libre, ils traduiront et transmettront votre rapport aux développeurs compétents.

Participer / en savoir plus

Si vous avez une certaine expérience dans le domaine du testing, vous pouvez rejoindre l’équipe.

Plus largement, nous sommes toujours à l’affût de nouveaux testeurs pour la version d’Ubuntu en développement. N’hésitez pas à aller faire un tour dans la section correspondante du forum ubuntu-fr !


  1. Si vous n’avez pas de compte sur Launchpad, c’est le moment de vous en créer un ! ↩

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